Lettre au Journal Le Devoir - non publiée
Montréal, le 20 mai 2004
Gérald Larose
CONSEIL DE LA SOUVERAINETÉ
a/s Société nationale des québécois et des québécoises de la Capitale
525, du bon Pasteur
Québec
(Qué)
G1R 5R6
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Courriel: unis@souverainete.info
OBJET: La politique linguistique et le rayonnement de la langue française
Bonjour Monsieur Larose,
J'étais de la soirée du 17 mai ou Débat sur la langue au Restaurant Lion d'Or. Soirée intéressante avec une brochette d'invités permettant d'inventorier les enjeux de la langue à travers le politique. Si j'y allais d'abord d'un commentaire plus personnel, je dirais qu'il y avait trop de resserrement lors de la période d'échanges avec le public.
Je trouve que la diversité des invités sert ce genre de débat. Il faudra continuer d'intégrer des membres de la communauté immigrante. On y trouve des apports percutants. Le témoignage d'Akos Verbocyz de la Commission scolaire du MEMO et membre du Forum jeunesse, nous aura mieux renseignés que le Québécois de souche quant aux raisons profondes renvoyant l'immigrant au choix de l'une des cultures dominantes.
Par contre, même s'il a beaucoup été question de fierté et d'amour de la langue, nous savons que le politique aura sa part de responsabilité. Car la fierté ne suffit pas! D'autant plus qu'il fallait bien se rendre à l'évidence, quant aux mutations et approches, à savoir qu'une certaine jeunesse se glorifie de parler "allo" (dixit) ou langues allophones métissées tout en s'alliant des Québécois-Québécoises de souche. Le message nous fut servi par la conférencière Marie-Claude Sarrazin. Néanmoins, cette dernière n'aura convaincu ni le parterre ni ses pairs quant à l'idéologie d'une langue transversale "allophone" en mutation et mettant en compte le refus de frontières des langues. Ce qui fit dire au citoyen québécois Akos Verbocyz qu'il n'y a rien à chercher de ce côté, puisqu'il s'agit d'individus ne maîtrisant aucune des langues parlées.
Par la lecture de son article intitulé "Montréal, ville internationale de langue française" (publié dans Le Devoir du 4 mai 2004) Bruno Roy pose la problématique d'une ville phare faisant de Montréal le lieu symbolique d'un Québec français en Amérique. Et pourtant, Montréal est cette plaque tournante, mais aussi lieu de combats où se jouent les grands enjeux du Québec français. L'article de Bruno Roy s'avère d'autant plus important, qu'il éclaire sur l'identité tout en ramenant à l'idée patrimoniale, là où converge l'interrelation d'un patrimoine universel (langue) tout en faisant du patrimoine et lieu de croisements (Montréal) cette bouche politique qu'on tente de museler en invoquant les fausses raisons du bilinguisme.
Depuis un certain temps, la problématique de la langue m'interpelle davantage. Pourquoi? A cause d'incidents survenus lors de Conseils de quartier. Je les fréquente plus assidûment depuis la dernière année (Arrondissement Plateau Mont-Royal) pour des préoccupations liées à l'écologie. Des incidents m'ont fait voir de front les attaques pernicieuses du bilinguisme et mieux cerner l'hypocrisie de la Ville de Montréal. De plus en plus, on y voit l'implantation d'un fonctionnement fait de décorum tout en pratiquant la loi du baillon. Tout en y intégrant les lois d'un bilinguisme s'implantant à petites doses! Il faut s'interroger sur les visées politiques que pourraient téléguider certains hauts fonctionnaires de la Ville à travers les méthodes subversives. D'autant plus, comme le disait l'exposé d'Anne Légaré, que les adversaires perçoivent la langue française comme subversive.
Je serai concrète quant aux faits et liens qui m'ont fait voir le danger d'effritement du patrimoine à travers le non-dit. Je fais référence au fait qu'un fonctionnaire de la Ville de Montréal vienne interpeller la mairesse au micro dans un discours bilingue. D'entrée de jeu, l'intervention s'orienta dans un français impeccable, mais après cinq minutes, le même individu poursuivait son exposé en anglais. Vu la longueur de l'exposé dans la deuxième langue...la mairesse lui donna la réplique en anglais.
Comme citoyenne déjà avisée des pratiques des Conseils de quartiers, j'y voyais une première...sans pour autant y voir réalité anodine! Ce que le temps vient me confirmer, car depuis lors, les interventions en anglais au Conseil de Quartier se sont multipliées. Ce qui amène graduellement Michel Prescott et/ou Madame Fotopoulos à leur donner réponse en anglais. Faut-il appréhender d'autres audaces?
J'appréhende d'autant plus que des événements font, en parallèle, émerger l'hypocrisie de la communication au sein des structures de la Ville de Montréal. Ainsi, lors de la consultation publique autour de la Charte, l'information n'a pas été donnée par les grands quotidiens, sauf de rares fois et par des annonces classées (La Presse et Gazette). C'est pourquoi l'information sera passée inaperçue, tant pour moi que pour d'autres. Bref, j'aurai pu prendre connaissance de l'émergence d'une consultation autour de la Charte par ce hasard d'appropriation du petit journal de quartier Place publique (kiosque du quartier des affaires - centre-ville) alors qu'il demeurait journal introuvable au sein même du Plateau Mont-Royal pour quantité de citoyens-citoyennes du territoire cible. Cela dit, tout en devant avouer que l'hebdomadaire et/ou mensuel du quartier, malgré son intérêt, ne saurait prétendre remplacer les grands quotidiens.
D'ailleurs, voyant perdurer l'absence d'information dans les quotidiens, lors d'un Conseil de Quartier du début d'année 2004, je profitai d'une intervention relative à mes autres préoccupations pour faire mention d'attentes citoyennes concernant la charte. Au premier degré, le besoin d'une diffusion de l'information de pointe dans les quotidiens. Sans pour autant préciser, Madame Fotopoulos m'a rassurée en disant que le public serait informé. Et pourtant, je serai informée à la faveur d'un hasard, puisque la communication liée à la consultation publique m'est venue de Place Publique. (Vol. XI, no 4, 28 février 2004). A noter que ce journal est sous la gouverne d'un fonctionnaire de la Ville de Montréal, lequel joue également le rôle d'éditeur pour SODECM.
Lors de la présentation d'un Mémoire concernant l'élaboration de cette Charte (avril 2004), j'ai volontairement inauguré ma présentation par la dénonciation de ces pratiques sélectives de diffusion de communications. D'autant plus que l'exclusivité des communiqués liés à la consultation publique m'avait été confirmée par un fonctionnaire (annonces classées - deux quotidiens montréalais). Il faut dire que je m'étonnais d'autant plus qu'en faisant lecture du mensuel Place Publique, sous la plume du fonctionnaire de la Ville de Montréal et éditeur pour SODECM, j'avais été confrontée aux doléances et/ou dénonciations de Dimitri Roussopoulos (Vol. XI, no 6, 27 mars 2004). Ce qui m'obligeait à d'autres interrogations sur les visées politiques des structures, puisque ces avancées venaient d'un individu assumant déjà un rôle prépondérant comme fonctionnaire de la Ville de Montréal, avec responsabilités rattachées à l'évolution d'une future Charte montréalaise de nos droits et responsabilités.
A mon sens, la culpabilité touche la Ville de Montréal au premier degré à travers un laisser-faire favorisant abus et orientation subversive d'une politique d'implantation du bilinguisme. Ce qui va à contre courant de l'évolution de Montréal, ville phare d'un Québec français.
J'ajouterai ce qui suit concernant la présentation des mémoires et le parterre clair semé lors de la consultation pour la charte montréalaise de nos droits et responsabilités. Le respect des citoyens-citoyennes exige la circulation de l'information. Dans l'immédiat, il est permis de douter des canaux de diffusion, voire même de certaines plates-formes politiques visant la démocratie participative.
Il ne faudra jamais oublier que la question politique québécoise d'une langue commune ne saurait s'appliquer uniquement à l'arrière-pays, mais tout autant aux structures et superstructures. Ce qui englobe Montréal, ville phare d'un Québec français!
Jeanne Gagnon
Écrivaine