dimanche 14 octobre 2001

Le Travail équitable…voudra l’équité!

Tout le monde sait que l’État s’est laissé séduire par le néolibéralisme. Voilà pourquoi les sociétés vivent des transformations majeures quant au monde du travail. Voilà pourquoi le syndicalisme planétaire cherche à créer des plates-formes qui permettront aux travailleurs-travailleuses d’être entendus. Ainsi apprenait-on tout récemment que le Bureau international du Travail (BIT) et son Bureau des activités pour les travailleurs (ACTRAV) avait organisé un symposium du 24 au 28 septembre à Genève. De telles activités favorisent l’étude de moyens pouvant renforcer la participation des travailleurs-travailleuses au système des Nations Unies. De même, l’influence du mouvement ouvrier sur les institutions, tels la Banque mondiale et le Fonds Monétaire International (FMI).[1] Dans la foulée de transformations pouvant favoriser l’équilibre, il s’agit d’une voie prometteuse. De fait, il faudra que l’évolution du syndicalisme international conduise vers des renforcements de l’interaction syndicale. Cela dit sans oublier l’éducation permanente d’une base qui ne pourra que se transformer à l’égal de la société pluraliste québécoise, mais aussi à l’égal des mutations que voudront les associations de salariés de l’avenir.[2]

A tous les échelons de la société, l’individu se doit de reconnaître sa double appartenance, à savoir reconnaissance du statut de citoyen, reconnaissance du statut de travailleur-travailleuse. Le syndicalisme en est le prolongement. Double appartenance qui ne va pas nécessairement à l’encontre des marchés et de l’État, mais qui vise initialement l’avancement de valeurs humanistes et dont le travail fait partie. Évidemment, l’État et le syndicalisme vivent des affrontements. Nul doute qu’affrontements et débats participent à l’évolution d’une démocratie. Par ailleurs, la conscience citoyenne s’enrichit à partir de choix individuels et collectifs.

Le drame du 11 septembre 2001 aura démontré nos liens quant aux enjeux politiques, là où interféraient souffrances, joies et récupération par le politique. On pourrait amener différents exemples, mais je ne mentionnerai que ce qui touche à la déstabilisation du travail. Ainsi, quelques jours après le conflit, des milliers de travailleurs furent mis à pied. Nous savons que la catastrophe aura permis d’accélérer des intentions toutes politiques liées à l’aéronautique. Ce qui semble coïncidence ne l’est pas. Les faits démontrent qu’une crise peut servir à la récupération sur plusieurs versants.

Revenons maintenant au quotidien du travail en dehors des marchés de l’aéronautique. La fragilité du travail fait partie de nos vies. La crise du monde du travail est amorcée depuis longtemps. Nous devons savoir et voir que la manipulation du stress sert le pouvoir politique. Le patronat est dans l’orbe des puissances politiques. Indéniablement, précarité et instabilité du marché du travail donne peu de marge de manœuvre aux syndicats mais beaucoup de pouvoir au patronat.

Ce que nous vivons à travers les transformations et reconfigurations des postes de travail, un peu partout à travers les sociétés industrielles et simultanément au sein de la fonction publique québécoise, est de l’ordre de bouleversements qui ont des incidences sur le virtuel et le futur de nos vies. On ne saurait voir les mutations du travail comme le drame de la précarité à transformer par un coup de baguette sur la politique économique de l’exportation.

La précarité nous est devenue plus perceptible depuis l’attaque terroriste du 11 septembre dernier, car nous avons subi un électrochoc politique. Depuis, tous les neurones de la conscience sont alertés. La conscience a franchi des ponts dont nous ne mesurons pas encore le décloisonnement. Ce qui pourrait nous obliger à repenser nos liens virtuels avec l’État démocratique et le développement d’infrastructures touchant les politiques de l’économie. Cela dit, en tenant compte que nous sommes arrivés au sein du village global pour y rester tout comme il demeure impensable de repenser le travail en faisant fi des technologies.

Par contre, nous savons que crise et mutations ne peuvent faire oublier la nécessité d’échanger. Voilà pourquoi le syndicalisme, et ce à partir de la FTQ, a raison d’exiger une mise au point à l’intérieur d’un Sommet qui réunirait les dirigeants politiques des différentes provinces. [3] Il faut que le lien entre l’État et le syndicalisme permette d’ouvrir à des perspectives où la société se donne des buts et jalons.

Entre temps, la fonction publique continue de vivre les mutations et reconfiguration de postes. Il pourrait en découler des valeurs justes et signes des temps, tout comme de l’injustice et inadéquation avec la réalité. Je parle de quantité de postes, mais tout particulièrement des postes du secrétariat. Déjà, de par son histoire, le secrétariat aura été méconnu quant aux responsabilités assumées. Ce qui peut devenir valeurs par les mutations de postes est lié au décloisonnement entre professionnels et secrétariat, mais plus encore à la responsabilisation du poste. Bref, la secrétaire dépendra moins d’un professionnel que de buts dont elle aura à répondre à travers un échéancier. Ce qui viendra interférer dans l’évaluation annuelle du grand gestionnaire.

Toujours dans la perspective des mutations, ce qui perdure en injustice est lié au refus de reconnaître les valeurs de tâches qui, de la table de travail d’un professionnel, ont abouti sur la table de travail du secrétariat. Ce qui confronte à l’alourdissement et au traquenard sans bénéfice moral ou salarial. Bref, le secrétariat continue de vivre l’inéquité morale et salariale.

A mon sens, la mutation et la reconfiguration des postes de travail au sein de la fonction publique favoriseront la productivité seulement si l’équité vient en compte. Il faudrait tout d’abord se doter d’une plate-forme susceptible d’éradiquer le jugement réducteur de petits fonctionnaires aux préjugés tenaces quant aux personnes et postes.


[1] L’Itinérant électronique, 27 septembre 2001.
[2] BRUNELLE, Christian, « Les défis du syndicalisme à l’heure des chartes », Le Devoir, 4 septembre 2001.
[3] Le Devoir, 12 octobre 2001.


Publié dans Visions Voisins, vol. 8, no 8, 30 octobre 2001

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