dimanche 9 juin 2002

Lettre ouverte adressée à Mme Viviane Barbot, présidente de la F.F.Q.

Madame la présidente,

L’assemblée générale de juin 2002 nous aura fait voir les forces et faiblesses de la Fédération des Femmes du Québec (F.F.Q.). D’une part, les forces d’un organisme capable de traverser “la crise de l’après-Marche mondiale des femmes” dans la transparence. Ce qui renvoie au sentier de réflexion et non au lieu de “règlements de comptes” entre différentes allégeances du féminisme.


D’autre part, ce rassemblement nous a fait palper les faiblesses d’un organisme qui n’a su ou pu, depuis la Marche mondiale des femmes, ouvrir à des liens permanents avec la base et la faire s’exprimer dans une vision politique éclatée. Ce qui ne veut pas dire mettre le conseil d’administration et la présidente devant le modèle “portes ouvertes avec la base” mais bien face à des sentiers ou comités thématiques susceptibles de politiser les femmes dans une vision citoyenne et féministe. Cela dit, en travaillant cette double vision, la F.F.Q. ne pourrait qu’ouvrir au nivellement de l’écart et au décloisonnement du rapport aux violences. A mon avis, toutes sont prioritaires… mais ne sauraient se travailler de façon juste sans l’aide d’une base militante politisée.

Indubitablement, parler de violences nous renvoie à quantité de profils. Les comités terrains auraient le mérite de regrouper les militantes à partir de visions personnelles et/ou sociopolitiques. Ce qui veut dire qu’un comité terrain aurait le loisir de s’attarder sur le vide juridique concernant les violences en logements quand d’autres travailleraient en latéral sur les droits, tels le droit à la non-pauvreté, le droit à la santé, le droit à l’éducation, voire même par des luttes débouchant sur la préservation des biens publics planétaires à travers l’écologie et le mondialisme prédateur.

Vous le savez, tout au long de ces deux jours, j’ai ramené l’assemblée aux comités polyvalents, tout en mettant l’accent sur les violences domiciliaires. La polymorphie des comités permettrait de rejoindre les femmes de toutes conditions, militantes ou non, dans leurs préoccupations “terrains”. Cela dit en admettant que tout comité terrain soit lieu d’expression où la base se reconnaîtrait tout en y rejoignant l’éclatement de consciences féministes et citoyennes.


Je suis consciente de la nécessité de l’engagement publique de la F.F.Q. face aux violences, tout en devant admettre que l’organisme ne saurait se commettre sans les relais auxquels je fais référence. Sans parler de la perte d’énergie pour l’organisme confronté au “cas par cas” et qui doit éviter les bavures politiques. Néanmoins, l’appui de la F.F.Q. est important comme porte-voix susceptible de remuer l’opinion publique. Voilà pourquoi les comités relais m’apparaissent une chaîne d’écoute politique sage, mais aussi lieu de nivellement du fossé entre la base et la pyramide.

Voilà pourquoi, Madame la Présidente, j’ai trouvé important de vous faire part de ma déception peu après la levée de l’assemblée générale. Il est évident que les femmes ne comprennent pas l’idée des comités terrains. On a tort de voir les comités logements comme des organismes susceptibles d’appuis envers les femmes violentées. L’aide ponctuelle de ces milieux est encadrée et ne saurait répondre aux cas tragiques. En 1994, un gestionnaire candide du Comité-Logement du Plateau Mont-Royal m’avouait la peur les animant quant aux interventions trop visibles pouvant leur faire perdre le droit aux subventions. L’actuel vide juridique abandonne les femmes violentées quand l’acte est de l’ordre d’un acte criminel vécu en toute impunité.

L’ensemble de mes publications prouve que j’ai beaucoup réfléchi sur l’évolution des profils de violences et sur l’absence des appuis. Quant à l’appui de la F.F.Q., je ne désespère pas… mais je sais qu’il faudra maintenant travailler la pédagogie afin de créer l’émulation autour des comités relais.

Ma lettre a pour but de réitérer ma volonté de ramener les propositions des comités terrains auprès des instances de la F.F.Q. En conséquence, j’aimerais que la Présidente et son conseil d’administration soient saisis de mes intentions, car il m’importe de ramener les propositions tant à la prochaine assemblée générale qu’au Congrès de la F.F.Q.

Publiée dans Visions Voisins, vol. 9, no 6, 1er août 2002.

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